06 Fév #Marchandisation vs Protection de nos données personnelles (Diffusion 06/02/2018)
On parle beaucoup des données personnelles en ce moment avec deux approches complètement opposées :
- D’un côté, le nouveau projet de loi « protection des données »
- De l’autre, la proposition du Think tank de Gaspard Koenig « Génération Libre » qui prône lui une « marchandisation des données »
Il faut savoir que c’est la loi « Informatique et libertés » qui veille depuis 1978 à la protection de nos données personnelles et qui a même créé la CNIL.
L’existence de cette loi fait suite à la parution, en 1974, d’un article « SAFARI ou la chasse aux français » fuitant que notre administration avait accès, grâce à l’informatique, à tous les français, en utilisant le n° de sécurité sociale comme identifiant, Sans bien sûr retenir les leçons du passé…
Face à une forte mobilisation de l’opinion publique de l’époque , le gouvernement avait été contraint d’abandonner ce projet au profit de la création de la CNIL qui veille à ce jour au respect de la loi de 78.
Mais avec l’apparition des nouvelles technologies, cette loi de 78 est devenue obsolète .. D’où la nécessité d’une nouvelle loi « Protection des données ».
Je rappelle qu’une donnée personnelle, c’est toute information qui permet d’identifier, directement ou indirectement, une personne physique.
Nous ne le savons peut-être pas mais nous laissons de nombreuses traces ou données, en naviguant sur Internet.
A l’ère numérique, nos données personnelles sont devenues l’or noir d’internet.
Elles sont récoltées en majeure partie par des acteurs privés américains Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft (les fameux GAFAM) qui ensuite les exploitent et les revendent à prix d’or à des tiers.
De fait, Génération Libre fait le constat amer que les utilisateurs ne tirent aucune rémunération directe de cette manne, qu’eux-mêmes fournissent ! « Si c’est gratuit, c’est nous le produit ! »
Aussi, Gaspard Koenig propose de créer un droit de propriété sur les données personnelles pour permettre aux utilisateurs de faire commerce eux-mêmes de leurs données.
Mais c’est oublier que nos données personnelles constituent une partie intégrante de nous-même, au même titre que les autres parties de notre corps et donc impossible de les réduire à un simple bien marchand !
Faire commerce de nos données personnelles serait la porte ouverte à une logique de marchandisation du corps humain comme cela se fait déjà avec l’achat d’organes dans des pays sous-développés.
Et puis c’est oublier le droit à la portabilité de nos données personnelles prévu dans le prochain règlement pour nous permettre de conserver le contrôle de nos données.
Même s’il est établi qu’il existe une marchandisation de nos données personnelles par les entreprises,
Encourager la marchandisation par les utilisateurs eux- mêmes, s’opposerait de fait au droit à la dignité humaine !
Pas sûr que ce soit acceptable pour la patrie des droits de l’homme
Nathalie Chiche
Rapporteure de l’étude du CESE sur la Gouvernance d’internet